LA VIANDE DANS TOUS SES ETATS - Reportage
La viande dans tous ses états, est un reportage (0h37) de l'émission Envoyé Spécial qui enquête sur l’état sanitaire des abattoirs dans lesquels, pour la rentabilité, les pratiques et les règles d’hygiène sont peu respectées, au détriment des risques pour la santé des consommateurs.
L'émission, du 16 février 2012, commence par l'évocation d'un rapport de la Cour des Comptes datant de 2008 et dénonçant la situation sanitaire préoccupante des abattoirs français. À l'époque, de graves manquements aux procédures d'hygiène avaient été relevés, 41% des abattoirs n'étant pas conformes. Ce chiffre inquiétant est retombé à 11% en 2012, mais les contrôles vétérinaires sont trop peu nombreux et n’ont pas vraiment les moyens de faire appliquer la loi.
Le scandale de la vache folle et les différentes crises sanitaires des 15 dernières années ont déjà alerté et interrogé notre société sur la production de masse de viande. À quelles règles sanitaires les éleveurs et les abattoirs français sont-ils soumis ? Sont-ils suffisamment contrôlés ? La viande qui finit dans nos assiettes est-elle sans risque pour notre santé ?
Cette enquête sur la viande en France permet de constater de nombreuses zones d’ombre, comme celle des méthodes d’abattage préconisées par la législation française qui sont souvent contournées par les abattoirs nationaux.
L’enquête d'Envoyé Spécial laisse également apparaître de graves anomalies mettant en danger la santé des consommateurs les plus fragiles comme les enfants. Le non-respect des procédures d'hygiène par le personnel des abattoirs permet en effet le développement de bactéries très dangereuses comme Escherichia coli, dont la présence dans les steaks hachés entraîne des risques mortels.
La pénurie croissante de vétérinaires chargés de contrôler les bêtes avant l'abattage, nommé ante-mortem, fait que l'opération est souvent réalisée par du personnel interne non qualifié ni formé.
Ainsi, dans une lettre adressée au Ministère de l'Agriculture le 23 juin 2010, la Cour des Comptes notait "l'incapacité de l'État à faire respecter la réglementation sanitaire des abattoirs en France". Par ailleurs, alors que la loi impose l'étourdissement préalable depuis 1964, les abattoirs d’Île-de-France utilisent systématiquement l'exception Halal ou Cacher sans étourdissement préalable afin de diminuer leurs coûts. D'après une enquête du Ministère de l'Agriculture, au niveau national, 32% des bêtes sont abattues en rituel, alors que les consommateurs Halal et Cacher ne représentent que 7% de la population.
Une Étude en Île de France montre que 100% de l’abattage en île de France est rituel. Le consommateur n’a pas le choix puisqu’il ne peux savoir comment l’animal est abattu, et il n'y a aucune obligation de le préciser dans les boucheries.
Dans l'islam, le terme "halal" signifie ce qui est permis ou autorisé pour le pratiquant. La viande dite halal répond à des critères coraniques précis : l'animal égorgé doit être vivant, sa tête tournée vers La Mecque et des paroles précises doivent être prononcées.
La certification halal n'est absolument pas encadrée par les autorités françaises, seules la qualité sanitaire et la traçabilité de la viande sont surveillées par les instances compétentes.
Les professionnels du secteur reconnaissent cependant que les consommateurs peuvent être amenés à manger de la viande halal sans le savoir. "Il peut se trouver que des pièces ou des morceaux de viande soient issus de carcasses abattues selon ce rite, mais ça ne change en rien la qualité de la viande et cela ne modifie pas du tout les qualités du produit", reconnaissait Dominique Langlois, président de l'Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes.
Cette porosité dans les réseaux de distribution s'explique notamment par les habitudes de consommateurs musulmans. "Pour des raisons économiques, certains abatteurs ovins et bovins misent sur la logique de complémentarité entre circuits de distribution musulmans et non-musulmans. Pour cette raison, la production halal dépasse assez largement la consommation halal estimée", explique le rapport des ministères de l'Agriculture et de l'Intérieur, qui précise que le mode d'abattage de ces viandes n'est que très rarement indiqué.
La journaliste, Guilaine Chenu, dit avoir pressenti les réactions d'une répercussion médiatique : "On savait qu'on levait des lièvres. Les répercussions auprès des téléspectateurs sont toujours grandes quand il s'agit de transparence dans le domaine de la consommation. Une enquête sur les restos asiatiques avait ainsi fait baisser leur fréquentation en 2004. Quant aux répercussions politiques et médiatiques, elles sont plus fortes en période électorale, mais les pouvoirs publics connaissaient l'ensemble des problèmes. On a fait notre travail de journaliste du service public, tant mieux si on a lancé un débat."
- Voir aussi :
FRAUDE ALIMENTAIRE, MALBOUFFE ET REMBALLE
LES PLATS PRÉPARÉS : QUE CACHENT-ILS ?